Mon père était secrétaire et administrateur d’une entreprise qui faisait des chemins. Il y avait un casse-pierre, grosse machine qui broyait de la pierre que l’on grugeait dans la montagne du Mont-Comi. On refaisait le chemin des Sept-Lacs à la paroisse de St-Gabriel, environ quatre milles. Après avoir pris de la pierre à même la montagne il fallait de la dynamite que l’on apportait au casse-pierre avec des chevaux attelés à des « waguines ». Après avoir broyé cette pierre, elle était acheminée encore avec des chevaux au chemin en construction.
Papa s’occupait de la gestion, il avait une petite résidence d’une pièce où il y avait deux lits, une table et quelques chaises. Le monsieur qui s’occupait de la mécanique habitait avec lui, c’était monsieur Mc Carty. Je ne me rappelle pas si papa venait coucher tous les soirs à la maison toujours est-il que maman lui envoyait son dîner. Souvent Norbert, Marc et moi partions avec brouette, lunch et aussi notre dîner. La route était longue, ça nous prenait une bonne partie de la journée, ce n’était pas dangereux, il n’y avait ni camion, ni auto. Après dîner, nous flânions près du camp de notre père; à ce moment-là, il était très malade, c’était avant son opération et il fallait qu’il se couche pour se reposer pendant la journée. Quand il se réveillait c’était le signal pour revenir à la maison. En été c’était très chaud. Le moindre petit ruisseau était une bonne occasion pour arrêter où on se faisait tremper les pieds, ça nous rafraîchissait. Je me demande encore si notre mère n’en profitait pas pour se reposer, trois de partis pour la journée !
L’ouvrage tenait mon père occupé six jours par semaine. Il n’avait que le dimanche que les travaux ne continuaient pas. Aussi quand le casse-pierre avait besoin de morceaux (ou pièces) pour des réparations, c’était aussi papa qui allait les chercher à Rimouski. Je me souviens à l’automne il faisait froid dans les autos, il n’y avait pas de chauffage. C’était un monsieur Dastous qui conduisait papa, quand c’était possible, il nous amenait. Un automne, il a apporté les peaux de carrioles, le froid nous a traversés quand même. Le chemin a été long au retour. Le chauffeur ne nous aimait pas. Il disait à papa : « Pourquoi te bâdrer de ces braillards? » Toutes les fois qu’il pouvait papa nous amenait.
Mon père fut opéré en 1932 pour un goitre insidieux, il état un cadavre ambulant, les yeux sortis de la tête, il dormait peu et était malin à cause du goitre. Ce fut un mois très pénible pour ma mère quand il fut hospitalisé à St-François d’Assise par le Dr Paquet. Quand mon père est revenu il était descendu en train. Dans ce temps le train arrêtait à Luceville. C’était en hiver. C’est l’oncle Jos Lepage qui était allé le chercher. Nous avons attendu, je m’imagine la fébrilité de ma mère. En arrivant il s’approche d’elle qui pleurait, il parle à maman tout bas. Nous, on se dit, ils se disent des mots d’amour. Mais non mon père ne parlait pas. Ça a pris un mois au moins avant qu’il puisse parler. Je disais que ce fut un mois pénible pour ma mère, elle dû s’occuper des livres du conseil, les livres des écoles, en plus, elle avait monté une pièce au métier. Avec la flanelle faite au métier elle a fait de belles chemises à mes frères et une robe pour moi, nous étions six enfants à ce moment-là.
Autant que je me souvienne, le premier Noël, je n’étais pas bien vieille, maman avait monté un arbre, c’était bien beau ce qu’elle avait pour la décoration c’était fait avec des bouts de tissu que tante Philomène s’était procurée quand elle était fille. D’ailleurs, quand elle a eu des enfants d’âge à s’intéresser à un arbre de Noël, elle est venue chercher ses affaires, alors l’arbre fut décoré avec des boucles de papier de couleur, des rubans. À ce premier Noël pendant que papa et maman assistaient à la messe de minuit c’est moi qui gardais les autres petits, c’est vrai que ce n’était pas difficile, mes frères dormaient. Moi pendant la messe j’ai écrit au Père Noël, je lui ai demandé bien des choses. Je pensais que rien n’était impossible pour le Père Noël. Cette fois-là j’ai eu une poupée (je crois que c’est la seule fois où j’ai eu une poupée) mais elle n’a pas duré longtemps. Norbert, mon frère, qui était curieux, a défait la poupée. La tête et les bras étaient fait de papier mâché et elle avait un sifflet dans le dos, on avait qu’à la baisser vers l’avant et elle disait maman. Même les jouets des autres enfants étaient bien vite en morceaux. Quand j’ai eu mes enfants plusieurs Noël se sont passés chez mon père et ma mère qui faisaient leur possible pour faire des cadeaux aux enfants. Mon frère Marc était habile en menuiserie. Une année il a fait des traîneaux, une autre année des skis qui sentaient encore la peinture le jour de Noël. Mes enfants ont été bien gâtés et très heureux de leurs cadeaux.
Mon père avait une terre à bois à un mille et demi de notre maison. Pour s’y rendre il y avait une route qui passait à côté de la maison et qui allait au Nord vers cette terre. Mon père allait chercher du bois en longueur et l’apportait dans notre cour pour le bois de chauffage. Il avait deux chevaux. Les samedis, comme les garçons n’allaient pas à l’école, c’était la tâche de mes frères Norbert et Marc de conduire les chevaux. Mais ce samedi là les deux garçons avaient la rougeole. J’endosse les pantalons et les bottes à Norbert. Je ne comprends pas pourquoi moi j’ai eu froid aux pieds. Tellement froid que quand j’y pense j’ai encore froid. Norbert, lui, n’avait jamais froid. Rendu dans le bois il y avait un camp où Alexis Lechasseur habitait quand il faisait du bois. Il y avait son père, le père Hector Lechasseur qui lui faisait à manger, il était l’oncle de ma mère et n’avait qu’une jambe. Il avait pris un lièvre et comme j’étais entrée pour me réchauffer il m’a servi une assiette de lièvre, patates et bouillon, c’était très bon. Ça m’a réchauffée les pieds pour un p’tit bout de temps…
Je voyais tous les soirs les enfants, les garçons évidemment, qui glissaient non loin de la maison. Comme je ne pouvais me joindre à eux, je me suis enfin décidée quand j’étais seule de me rendre sur le coteau. La traîne était pesante et il y avait beaucoup de neige. Je n’ai pu donner la poussée assez forte, ça descendait mais pas comme j’aurais voulu. J’ai dû remonter la traîne à la maison. Là, j’en ai eu assez des glissades.
Papa avait prêté de l’argent à un cousin de Ste-Luce. Comme il ne pouvait pas rembourser ce prêt, ce cousin dit à papa : « Viens te chercher des patates ». Les cultivateurs de Ste-Luce avaient des terres à patates et papa est allé chercher une charge de patates. Ce n’était pas énorme en voiture à cheval, donc ça ne pouvait pas être une trop grosse charge. Une fois rendu à la maison, il a dit à quelques familles de venir se chercher un sac de patates qu’il leur donnait. Ça n’a pas été long qu’il n’y avait plus de patates. C’est là aussi que j’ai vu comment les gens se comportaient, il y en avait qui avait apporté le plus gros sac qu’ils avaient trouvé, ça pouvait contenir deux sacs ordinaires.
Il y avait un monsieur Jean-Baptiste Desrosiers qui était forgeron sur la petite route du Nord pas loin de chez nous. Nous allions souvent voir comment il ferrait les chevaux. Et moi j’aimais la senteur de la boutique, j’aimais quand il taillait la corne des sabots des chevaux et quand il activait le feu pour faire rougir le fer pour le modeler. Vraisemblablement, j’étais pieds nus, il nous disait :« N’approchez pas trop ». Mais moi, je n’étais jamais assez proche. Un bon jour, je mis le pied sur un morceau de fer chauffé à blanc. Imaginez ma douleur, je n’étais plus capable de marcher. Le morceau de fer était resté collé à mon pied quelques instants. Mes frères Norbert et Marc m’ont prise dans leurs bras et m’ont ramenée à la maison. Après cet incident ma mère n’a plus eu besoin de me défendre d’aller à la boutique.
Quand mon père a eu son rendez-vous pour se faire opérer, il restait une besogne qu’il retardait de jour en jour. C’était de baigner ses poules car elles avaient des poux. Un soir nous nous rendons au poulailler avec de l’eau chaude et du poison contre les poux de poules. Nous avons aidé notre père. Ce fut un plaisir pour nous, mais pas pour lui car il était épuisé après cet ouvrage.
Après je me souviendrai toujours que les poules « cacassaient ». On plongeait les poules dans l’eau chaude, et comme c’était l’automne, les poules semblaient aimer cette baignade, elles avaient l’air de dire « Chu ben, chu ben … ». Le lendemain les poules étaient jaunes à cause du produit.
L’hiver où papa était à l’hôpital, maman avait bien de l’ouvrage. Un après-midi, échappant à la surveillance, nous nous sommes rendus au presbytère. Il y avait à part mes frères et moi un garçon de l’âge à Norbert nommé Aldège Belisle ainsi que sa sœur plus âgée que moi qui s’appelait Bibiane, ils étaient tous les deux élevés par le curé. Nous avons fait le tour du presbytère du haut en bas, le grenier en particulier. C’était beau, grand et vaste pour nous parce que chez nous le grenier était encombré de boîtes et de toutes sortes de choses. Au presbytère il n’avait rien de tout cela. Les servantes ne faisaient que servir le curé et le vicaire. Elles n’avaient pas besoin de ramasser de guenilles pour tisser. Toujours est-il que l’après-midi se passe. J’ai trouvé cela long et la faim finit par me tenailler. Les dames du presbytère n’osaient pas nous dire de rentrer chez nous. J’ai enfin réalisé que je n’avais pas demandé la permission pour m’absenter. Nous sommes arrivés chez nous, maman était terriblement fâchée. Elle avait questionné tous les voisins, personnes ne nous avaient vus. Je ne me rappelle pas si nous avons été punis. Mais je me rappelle que mon oncle Arthur Morrissette qui était à la maison en l’absence de papa, s’est moqué longtemps de ma mère. On n’est pas riche, disait-elle mais on en a assez pour s’ôter la vie. Mon oncle riait aux éclats car elle voulait dire « se sauver la vie ». Comme il était taquin, cette phrase lui revenait souvent : « On en a assez pour s’ôter la vie ».
Ma mère récupérait du vieux linge dont elle confectionnait des vêtements pour nous et pour elle. C’est pour ça qu’on était bien habillée. Ce qui ne servait pas à la confection de vêtements, elle le coupait en lanières pour faire des couvertures de catalognes. Les vieux vêtements en laine étaient « échiffés » défaits brin à brin pour être lavés à l’eau très chaude et savonneuse et brassés, brassés encore. Ce qui donnait une fibre mousseuse qu’elle cardait pour enfin filer puis tisser en couverture parce qu’en plus des catalognes, nous avions des couvertures de laine. Hélas ce lainage était presque toujours de couleur grise. Quand j’étais jeune, vers quinze ou dix-sept ans, nous sommes allés chez des voisins qui restaient chez un dénommé Dastous, maison qui fut habitée plus tard par la famille Robert Parent, des gens qui venaient de l’extérieur. Dans leurs lits il y avait de vieux manteaux qui leur servaient de matelas et même de couvertures, nous, on se trouvait mieux couchés car nous avions des couvertures de laine, des catalognes et un couvre-lit de courtepointe. Des couvre-lits fait par ma grand-mère au métier. C’était en laine on disait que c’était des « festons frappés ». Je ne comprenais pas que la mère de cette famille n’avait pas l’idée de découdre les vieux manteaux et les recoudre pour se faire des couvertures. Je trouvais cela inconcevable, c’est vrai que ma mère était débrouillarde et ingénieuse. Maman était habile et travaillait bien en plus des ouvrages de bureau quand papa n’y était pas, elle ne s’est pas tournée les pouces. Je l’ai vue souvent quand elle filait la laine, elle s’endormait sur son rouet. Quel courage a eu ma mère.
L’été nous allions aux petites fraises des champs à l’arrière de la maison. Il y avait les Sirois, on les appelait « les chiounes », ils étaient plus grands que nous, ils nous disaient : « On va vous aider à emplir vos videux » Ils arrivent les mains pleines et emplissent nos récipients. Hélas c’était de la terre et de l’herbe qu’ils avaient dans les mains. Nous étions bien déçus de nous être fiés à ces grands drôles.
Nous allons à la messe tous les dimanches. Elle durait au moins deux heures. J’étais encore jeune, je toussais, toussais. J’eu l’idée de revenir à la maison. Pour pas que maman me dispute, j’ai été me cacher sous un lit au deuxième étage. Quand les gens de la messe sont revenus j’ai descendu, et ma mère n’a jamais su que j’avais écourté ma messe. On allait ordinairement à la grand-messe de dix heures. Les garçons chantaient dans le chœur, papa chantait au jubé et maman allait à la messe de sept heures et demie, j’étais la seule de la famille dans la nef, voilà pourquoi personne ne s’est rendu compte de mon absence.
Nécessairement, dans le temps, on chauffait au bois. On avait ni huile ni électricité. Un jour, on avait déversé dans la cour un voyage de bois. C’était de la « délignure » de planches qui venaient du moulin à scie. Il fallait couper ces délignures en longueur pour le poêle; ce qui se faisait avec une hache sur une bûche. Papa prenait une délignure d’une main et la hache de l’autre pour les découper. Ç’avait l’air bien facile. Mon père nous disait : « Ne touchez pas à la hache quand je ne suis pas là ». Il faut dire qu’il devait s’absenter souvent à cause de son implication dans le village. Par exemple : secrétaire de la municipalité, chantre, bedeau, huissier, etc… Et en plus, il n’avait pas une grosse santé, il devait s’arrêter souvent de travailler. Comme j’aimais tout essayer, je prends la hache, mais au lieu de l’abattre sur le morceau de bois, c’est sur ma jambe qu’elle s’est arrêtée. J’étais mal prise, j’avais entendu maman dire : « Si vous vous estropiez, je vais vous taper par-dessus. ». Alors vous pensez bien que ça faisait assez mal… et en plus mon soulier était déjà plein de sang. Je réussis à me faufiler et monter dans mon lit où je me suis enfin endormie. Mes parents m’ont cherchée, quand ils m’ont trouvée, ils m’ont demandé pourquoi je ne leur avais pas dit, vous devinez bien la réponse. Le sang avait eu le temps de sécher et mon soulier était pris à mon pied. On m’a fait tremper la jambe dans un sceau et ensuite mis un bandage. Avec le sang la blessure semblait énorme, c’était impressionnant. J’avais l’air bien misérable…
J’avais huit ans, ses lettres étaient entreposées dans une garde-robe, je me suis appropriée ses lettres. Je ne me souviens pas bien ce qui se disait mais je me souviens bien que celles de mon père étaient un très beau style et bien écrit, voyez que j’étais curieuse et je le suis encore.
Un dimanche après-midi c’était tranquille à la maison et j’étais malade. Je me suis fait prendre par ma mère et elle m’a bercée. J’étais si bien que je me souviens encore comme c’était doux mais ce ne fut pas long, il est entré quelqu’un, il ne fallait pas que maman berce une grande fille, elle avait honte. Je ne devais pas avoir plus de sept ans.
La vie n’a pas été toujours rose :
mon retour de l’hôpital…
Quand j’étais jeune, à mes débuts à l’école vers six ans, j’avais de grands cheveux longs blonds. Maman me faisait des boudins sur des guenilles. Quand j’ai commencé l’école je pleurais quand c’était le temps de mettre les cheveux sur ces guenilles ce qui était inconfortable la nuit et quand il fallait démêler les cheveux. Alors maman a décidé de me les couper, après mes cheveux sont devenus bruns. Jusqu’à maintenant mes cheveux ne sont pas trop gris. J’ai porté longtemps un chignon quelques années plus tard après mon remariage pour faire plaisir à mon mari qui aimait les cheveux longs.
Ma première année d’école c’était Alice Plante mon institutrice de l’école; de la maison, ça n’était pas loin. Il y avait une fille, Adélia Croft, un peu plus délurée que moi, plus avertie. Elle me dit : « Imagine-toi, en parlant d’un autre petit garçon qui était avec nous, il a sacré, imagine-toi qu’il a dit cal…. ». À mon idée ma mère disait « calvasse » comme patois mais elle me dit non, c’est cal…VERT en l’épelant. « Calvert » que je répète et elle me dit « Oui ». Je ne savais pas que c’était sacrer. Toujours est-il que le lendemain l’institutrice me garde en retenue, après la classe toute fière j’attendais. Pendant qu’elle faisait le tableau, la sœur de l’institutrice entre en me voyant elle dit : « Que fait-elle ? », l’institutrice de répondre « Imagine-toi qu’elle a sacré. Je ne comprends pas, pourvu que monsieur Roussel ne le sache pas ». Moi, pauvre ignorante, je ne savais pas ce que c’était que sacrer ou blasphémer parce que mon père ne blasphémait pas et le père d’Adélia était renommé pour sacrer, je l’ai appris plus tard.
Un jour je suis allée au magasin, on disait : « Chez Ti-Fred », c’était un magasin général. J’étais bien jeune et il y avait à côté du magasin un camion réservoir à l’huile de charbon. Le camionneur avait posé le boyau qui déversait son contenu dans un réservoir souterrain. Je l’avais vu poser ce boyau. Ç’avait l’air facile. Il est entré à l’intérieur du magasin et moi par curiosité je vais enlever le boyau. Mais comme le jet était très fort je n’ai pas été capable de le replacer dans le tuyau. J’ai reçu de l’huile partout. Je m’étais faite arroser de belle manière. Là, je suis partie à la course chez moi. Pas besoin de vous dire que j’étais trempée. Je me cache sous le perron et de là je pouvais voir le magasin. À ce moment, je vois sortir Ti-Fred, le chauffeur et Yvonne, la commis, ils regardaient partout, mais l’huile avait eu le temps de se déverser au complet par terre. Après je suis entrée, furtivement dans la maison, me chercher un bassin d’eau et du savon pour me laver. Ce que je devais sentir l’huile! Je ne me souviens pas ce qui s’est passé par la suite.
J’aimais les dimanches parce qu’il y avait beaucoup de monde, ça jasait, ça faisait de l’activité dans la maison et on apprenait les histoires de tout un chacun. Il y avait aussi les quarante heures; c’était des temps de prières, il y avait les retraites paroissiales qui duraient jusqu’à trois semaines. Aux fêtes d’obligations, s’ajoutait le premier novembre c’est donc dire que la maison était achalandée. Ce qui a fait dire à ma mère, après avoir déménagé dans la maison des Langlois, qu’elle avait un gros poids d’enlevé sur son dos. Il faut dire que la famille augmentait de plus en plus. Comme nous étions près de l’église et que nous avions une écurie pour abriter les chevaux, les gens n’avaient que des voitures à chevaux, nous avions beaucoup de monde à la maison. L’écurie servait pour abriter les chevaux l’hiver contre le vent et le froid, quand l’écurie était pleine de chevaux, c’était chaud et l’été ils étaient à l’abri du soleil et des mouches. Les hommes en arrivant de la messe n’attelaient pas tout de suite leurs chevaux, des fois, ils restaient une heure et plus à discuter surtout de politique, faut aussi dire qu’il n’y avait ni TV, ni radio et plusieurs ne savaient pas lire. Quand il faisait froid ou trop chaud l’été c’était fatigant pour les madames d’attendre debout à l’abri de la maison, alors maman faisait entrer ces madames avec leurs enfants et les faisait asseoir. Quelques-uns d’entre eux apportaient leur déjeuner pour manger chez nous après la première messe et retournaient à l’église pour la deuxième messe soit la grand messe, celle que nous assistions. Maman allait à la première messe pour pouvoir recevoir les gens après chaque messe. Les gens n’avait accès qu’à seulement la cuisine et s’ils étaient trop nombreux on ouvrait le bureau, le salon était réservé à la grand visite même pas pour nous, surtout les vieilles entraient pour s’asseoir et jaser avec tout le monde. La cuisine avait été nettoyée par maman pendant la grand messe.
Parmi eux il y avait la famille de monsieur Siméon Lévesque du rang Massé dont plusieurs garçons étaient mariés, ils avaient donc chacun leur voiture. Madame Siméon Lévesque avait une fille blonde avec de grands cheveux en boudins, elle avait l’air jeune mais avait dix-sept ans de plus que moi. Elle était très timide, était toujours très près de sa mère. Il y avait un garçon aussi timide qui ne disait pas un mot, adossé à l’évier; moi je ne trouvais pas le temps long quand il était là. Le garçon c’est André-Albert Lévesque aujourd’hui mon mari qui a huit ans de plus que moi. Il était très beau, ils n’étaient pas dérangeants eux autres.
Un jour, mon père achète une « centrifuge »; appareil qui servait à séparer la crème du lait. C’était une centrifuge manuelle avec une poignée qu’on virait à la main car les modèles de ce temps n’avaient pas de moteur. De toute façon l’électricité n’était pas arrivée au village. Il était assez rare chez des cultivateurs comme nous de posséder cet instrument car seulement avec deux ou trois vaches les gens utilisaient ordinairement une écrémeuse : petit bidon, avec une vitre étroite sur le côté qui permettait de voir si la crème s’était concentrée sur le dessus. Avec ce peu de crème nous n’avions pas une grosse quantité de beurre. La fameuse centrifuge nous a été livrée dans une grosse boîte de bois, de la forme d’une tombe avec son couvercle. La boîte avait été entreposée au grenier. Une journée, nous jouions à essayer la fameuse boîte chacun notre tour, pour savoir lequel allait rester le plus longtemps enfermé. Quand il y en avait un à l’intérieur, les autres s’assoyaient sur la boîte. Quand ce fut mon tour, ça n’a pas pris de temps que le couvercle a été repoussé avec force, personne n’avait eu le temps de s’asseoir dessus. J’ai descendu du grenier à toute vitesse pour retrouver ma mère car j’avais eu peur d’être renfermée.
Pendant la période de la marche au catéchisme, ça amenait beaucoup d’enfants au village. Le soir les garçons allaient glisser avec la belle traîne que mon père avait fait. Nous les filles, on devait faire la vaisselle, quand nous avions fini les garçons étaient déjà partis avec la traîne. Nous les filles, nous nous rassemblions pour les voir glisser. Un soir après le souper Laurette et moi nous ne faisons pas la vaisselle et nous prenons la traîne. Une fois sur la butte avant les garçons, ce qui les a fâchés, alors un d’eux nous donne un coup de côté et un autre de l’autre côté la même chose et voilà la traîne sans dessus-dessous et moi dessous. J’ai sorti de là le visage ensanglanté. J’en ai encore des cicatrices.
Quand j’étais jeune il paraît que j’avais mal au ventre. Maman ça l’inquiétait et elle a pensé de me faire voir par un médecin. Papa m’a amenée à Rimouski voir le médecin qui s’appelait Lepage. Pour aller à Rimouski on descendait à Luceville en voiture à cheval, on prenait le train. Un voyage à Rimouski prenait une grande journée. Je me souviens qu’il y avait un canapé, il m’a fait étendre, m’a auscultée, il paraît que j’avais rien de grave, il avait proposé que je porte une ceinture. Toujours d’après mes parents au bout d’une couple de jours la ceinture il n’en était plus question et je n’ai plus eu mal au ventre. Je me souviens aussi nous sommes allés dîner soit dans un restaurant ou à l’hôtel toujours est-il quand ce fut le temps du dessert mon père m’a dit de ne pas le manger il n’aurait pas besoin de le payer, ça coûtait déjà assez cher.
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